•  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  
  •  

Cette ville prend les grands moyens pour mettre fin aux rénovictions

Une rue du centre-ville de Hamilton en plein hiver.

Le 17 janvier, les élus de Hamilton ont approuvé à l’unanimité les termes d’un nouvel arrêté municipal pour lutter contre les rénovictions dites de mauvaise foi. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Justin Chandler

La Ville de Hamilton, en Ontario, est sur le point d’adopter un règlement pour lutter contre les propriétaires qui tentent d’expulser leur locataire pour augmenter le loyer du prochain. Une stratégie quelque peu risquée, mais qui pourrait avoir d’importantes ramifications partout en province.

Toc, toc, toc!

Votre propriétaire cogne à votre porte et vous remet un formulaire de quatre pages. En haut à droite, trois caractères sinistres : N13. Il s’agit d’un avis de résiliation du bail, car le propriétaire veut faire des rénovations. Vous devez quitter les lieux d’ici quatre mois.

Un scénario cauchemardesque pour beaucoup d’Ontariens qui ne peuvent se permettre de déménager dans un nouveau logement depuis la montée du prix des loyers.

Ce scénario, tout à fait légal, survient fréquemment. En 2022 seulement, au moins 132 avis N13 ont été livrés à des locataires de Hamilton.

Un formulaire N13 vierge.

Les propriétaires sont tenus de livrer un avis N13 comme celui-ci aux locataires qu'ils souhaitent évincer pour faire des rénovations.

Photo : Radio-Canada / Jean-Loup Doudard

Crise du logement à Toronto

Consulter le dossier complet

Un grand immeuble à appartement vue des airs, avec le centre-ville de Toronto à l'arrière.

C’est ce que l’on appelle des rénovictions, et la ville de l’acier a fait il y a deux semaines le premier pas pour mettre fin à un phénomène que l’on constate partout en Ontario.

Comment ça marche

Le 17 janvier, les élus de Hamilton ont approuvé à l’unanimité les termes d’un nouvel arrêté municipal pour lutter contre les rénovictions dites de mauvaise foi, c’est-à-dire les expulsions de locataires pour des rénovations superficielles. Une fois qu'ils sont expulsés, les propriétaires augmentent les loyers pour les nouveaux locataires.

Selon ce nouvel arrêté, les propriétaires devront obtenir un permis auprès de la Ville, au plus tard sept jours après avoir remis un formulaire N13 à leur locataire. Ce permis, qui coûte 715 $, ne sera délivré que si le propriétaire obtient l’attestation d’une personne qualifiée – telle qu’un ingénieur – que l’évacuation des lieux est nécessaire pour effectuer les rénovations désirées.

De plus, les propriétaires devront trouver un logement équivalent pour les locataires qui souhaitent regagner leur chez-soi une fois les rénovations terminées.

L'hôtel de ville de Hamilton vu des airs.

L'hôtel de ville de Hamilton

Photo : Radio-Canada / Adam Carter/CBC News

Cette exigence est déjà prévue dans la Loi sur la location à usage d'habitation, mais certains propriétaires ne la respectent pas. Le cas échéant, les locataires peuvent contester cette injustice devant la Commission de la location immobilière, mais celle-ci accuse des délais routiniers de plusieurs mois.

La Ville de Hamilton choisit donc de s’immiscer dans ce processus qui ne relève autrement que du champ de compétence provincial. L’arrêté doit encore être approuvé lors d’une réunion du conseil municipal au cours des prochaines semaines.

Contestation probable

En calquant leur permis sur des exigences déjà prévues dans la loi provinciale, Hamilton s’avance plus loin que n’importe quelle autre municipalité ontarienne.

Une approche créative et intéressante, croit l’expert en droit immobilier Rodrigue Escayola.

Ce qui est tout à fait dans le champ de compétence de la municipalité, c'est l'émission de permis de construction, et c'est également tout ce qui touche l'occupation d'une unité locative. Et les municipalités peuvent mettre des conditions.

C'est là qu'ils montent sur l'autobus provincial en disant : "Une des conditions, c'est que tu respectes les obligations qui existent déjà dans la loi provinciale."

Une citation de Rodrigue Escayola, expert en droit immobilier

Il y a peu de risques que la province conteste directement cet arrêté, croit M. Escayola, mais une association de propriétaires pourrait être tentée de poursuivre la Ville de Hamilton sur la question du champ de compétence.

C’est ce qui s’est passé à New Westminster, en Colombie-Britannique, la seule autre Ville au pays à avoir adopté un règlement similaire. Un groupe de promoteurs immobiliers a affirmé que le règlement allait au-delà des responsabilités municipales et qu'il était contradictoire.

Une personne sous la neige à New Westminster, en Colombie-Britannique, le 17 janvier 2024.

La Ville de New Westminster, en Colombie-Britannique, a servi de modèle à Hamilton pour la conception de son règlement municipal.

Photo : Radio-Canada / Camille Vernet

La Cour d’appel de la Colombie-Britannique a donné raison à New Westminster, mais le litige a traîné en cour pendant plusieurs années.

Le conseil municipal de Hamilton est loin de se leurrer. Les élus ont consulté leurs avocats pour connaître les risques d'action en justice auxquels ils pourraient s’exposer. Mais le jeu en vaut la chandelle, selon eux.

Serons-nous contestés? C'était tout à fait possible, mais je crois sincèrement que la manière dont [l’arrêté] est conçu est défendable.

Une citation de Brad Clark, conseiller municipal de Hamilton

Un précurseur surveillé de près

Je ne veux pas prédire du malheur, mais il va presque certainement y avoir une contestation à un moment donné, affirme M. Escayola. Ça va être le test et je pense que toutes les autres municipalités vont regarder comment ça se déroule pour voir elles-mêmes "est-ce qu'on fait la même chose?"

C’est le cas de la municipalité de Sarnia, 73 944 âmes, nichée à l’extrême sud du lac Huron. Les rénovictions y sont également monnaie courante. Si la Ville n’a reçu que trois plaintes officielles, la conseillère municipale Anne Marie Gillis dit avoir reçu de nombreux appels concernant ce genre d’expulsion.

Nous avons une importante population de personnes âgées et une grande partie des personnes qui semblent ciblées sont des résidents de longue date et vous savez que vous avez un public captif ici, dit-elle.

Une femme est assise à un bureau, elle sourit à la caméra et a les mains croisées.

Anne Marie Gillis, conseillère municipale à Sarnia en Ontario (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Colin Côté-Paulette

Reconnaissant l’ampleur du problème, le conseil municipal a voulu agir, mais hésite devant les risques qui y sont liés et les coûts que pourrait engendrer une contestation. En décembre, la Ville a adopté une motion pour surveiller de près la démarche en cours à Hamilton.

J'ai vraiment hâte de voir la formulation réelle de ce règlement afin que nous sachions si nous pouvons l'utiliser, comment nous l'appliquerions et quelles en sont les ramifications.

Une citation de Anne Marie Gillis, conseillère municipale de Sarnia

Il y a fort à parier que le règlement municipal de Hamilton pourrait s’appliquer ailleurs en Ontario, selon M. Escayola, mais le seul moyen d’en être sûr est de le prouver en Cour supérieure.

Dans un courriel à Radio-Canada, le ministère des Affaires municipales et du Logement n'avance pas d'avis sur la légalité de l'arrêté municipal de Hamilton.

La porte-parole, Bianca Meta, affirme toutefois que toutes les décisions visant à déterminer si un contrat de location résidentielle peut ou non prendre fin en raison de travaux de rénovation ou de réparation sont régies par la loi de 2006 sur la location à usage d'habitation, qui est une loi provinciale.

Infolettre d’ICI Ontario

Abonnez-vous à l’infolettre d’ICI Ontario.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre Ontario.

Les motions et les règlements qui ne relèvent pas de la compétence de la Ville de Hamilton n'aideront pas les locataires et n'encourageront pas les propriétaires, grands et petits, à investir à Hamilton, affirme la porte-parole.

D’ici là, les locataires en situation précaire de la ville de l’acier peuvent compter sur un nouvel allié dans leur camp, leur conseil municipal.

Avec des informations de CBC News British Columbia

Vous souhaitez signaler une erreur?Écrivez-nous (Nouvelle fenêtre)

Vous voulez signaler un événement dont vous êtes témoin?Écrivez-nous en toute confidentialité (Nouvelle fenêtre)

Vous aimeriez en savoir plus sur le travail de journaliste?Consultez nos normes et pratiques journalistiques (Nouvelle fenêtre)

Chargement en cours

Infolettre Info nationale

Nouvelles, analyses, reportages : deux fois par jour, recevez l’essentiel de l’actualité.

Formulaire pour s’abonner à l’infolettre Info nationale.