Les « machines à diplômes » ontariennes sous la loupe d’Ottawa
Les campus satellites de collèges ontariens souvent établis dans des centres commerciaux ou des parcs industriels attirent surtout des étudiants étrangers cherchant à s'établir au Canada.
À compter du 1er septembre, les diplômés étrangers des collèges privés ne seront plus admissibles à un permis de travail canadien.
Photo : Associated Press / Mark Felix
Des collèges publics ontariens, dont les programmes sont offerts par des établissements privés, pourraient faire face à de grandes difficultés financières dès septembre en raison d'une nouvelle mesure d'Ottawa visant à protéger les étudiants étrangers.
À partir de la prochaine rentrée, les diplômés étrangers de ces établissements ne seront plus admissibles à un permis de travail postdiplôme. La durée de celui-ci ne dépassera pas celle du programme d'étude de l'étudiant.
Les établissements visés par la mesure, qu'on peut trouver dans des centres commerciaux et des parcs industriels du Grand Toronto, attirent un nombre important d'étudiants étrangers et soutiennent financièrement le collège pour lequel ils offrent des cours, explique Alex Usher, président de la firme de consultants Higher Education Strategy Associate.
Le campus du collège Stanford, à Mississauga.
Photo : Radio-Canada
Cependant, au cours des dernières années, certains de ces établissements privés se sont forgé une réputation peu enviable.
Jaspreet Singh, président de l'association internationale des étudiants sikhs, les qualifie de machines à diplômes.
Ces collèges, dit-il, profitent des étudiants étrangers.
Jaspreet Singh, président de l'association internationale des étudiants sikhs
Photo : Gracieuseté : Jaspreet Singh
Des établissements en péril
Plusieurs établissements du nord de la province auront de vraies craintes
de faire faillite dans les deux prochaines années, puisqu'ils risquent de perdre 90 % de leurs étudiants, pense Alex Usher.
Le consultant souligne que les étudiants étrangers empruntaient ce parcours parce qu’il s’agit de la façon la plus rapide
pour devenir un citoyen canadien.
Des collèges du Nord de l'Ontario tels que Cambrian (Sudbury), Canadore (North Bay) et Sault (Sault-Sainte-Marie) ont tous des partenariats avec des collèges privés du Grand Toronto.
Environ 70 % des étudiants du Collège Canadore sont de l'étranger, d'après les données de la province.
Alex Usher, président de Higher Education Strategy Associates. (Photo d'archives)
Photo : Radio-Canada / Paul-André St-Onge
Le président du Collège Sault, David Orazietti, affirme que la décision du ministre de l'Immigration créera de sérieux problèmes
pour son établissement et causera des déficits budgétaires. Le Collège Sault a fait des profits de 10 millions de dollars par l'entremise de son entente avec son partenaire privé triOS College au cours des trois dernières années.
M. Orazietti croit aussi toutefois qu'il y a de mauvais joueurs dans le secteur
et que le gouvernement doit révoquer leurs licences.
Le gouvernement doit déterminer si ces établissements offrent des services de logements, des services pour aider les finissants à se trouver des emplois ainsi que des services de santé mentale et autres services étudiants essentiels.
Le campus de triOS College, le partenaire commercial du Sault College.
Photo : Site web du collège Sault.
M. Orazietti affirme que le Collège Sault et son partenaire commercial
offrent tous ces services sur leurs campus.
Cela ne sert à rien de venir ici
L'inquiétude règne sur les campus satellites depuis l'annonce du ministre fédéral.
C'est assez déprimant [cette annonce] et c'est préoccupant
, se désole Ankita Sharma, qui étudie au Collège Stanford de Mississauga, un établissement qui a un accord avec le Collège Canadore.
Si nous ne pouvons pas obtenir de permis [de travail] après nos études, cela ne sert à rien de venir ici.
L'annonce du ministre de l’Immigration, Marc Miller, pourrait mettre en difficulté certains collèges ontariens. (Photo d'archives)
Photo : La Presse canadienne / Christinne Muschi
Manjot Kaul, aussi originaire de l’Inde, qualifie la décision d'Ottawa d'injuste
. Chacun a ses propres objectifs, ses propres rêves dans la vie, et chacun devrait avoir l'occasion de [travailler] ici s'il obtient [un diplôme].
Une piètre
éducation
Souvent, ces rêves ne deviennent pas réalité, nuance cependant Jaspreet Singh. Il n'y a aucune demande pour les compétences acquises dans les collèges satellites sur le marché du travail, explique-t-il, puisque les standards des établissements sont vraiment bas
.
Il ajoute que les services de bien-être et de santé mentale des étudiants sont inexistants
.
C’est de l’exploitation d'étudiants, les étudiants viennent de l’Inde et d'autres pays à la recherche d'une meilleure vie. Ils dépensent toutes les économies de leurs familles, puis ils arrivent ici et réalisent que ces établissements ne font qu’utiliser le nom d'un collège public.
Il explique que des établissements privés vont vraisemblablement fermer leurs portes
puisque les étudiants n'ont aucune raison de s'y inscrire s’ils ne peuvent pas obtenir un permis de travail postdiplôme.
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Ils devraient être fermés, c’est une question d’intégrité pour le système d’éducation
, pense Jaspreet Singh.
Un porte-parole de Collèges Ontario – l'association représentant les 24 collèges de la province – n'a pas voulu se prononcer sur les possibles conséquences de l’annonce du gouvernement fédéral sur les collèges de la province.
Avec des informations de Jérémie Bergeron, Katherine Brulotte et CBC